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Nigelle de Damas

Nigelle de Damas

Cheveux de Vénus

J’ai fait ce matin une rencontre étonnante. Cachée sous les immortelles que je regarde toujours avec attention, attirée par leur chaud parfum de maquis, une nigelle de Damas.

Je vous livre un extrait du livre de Jean-Marie Pelt « les langages secret de la nature » qui, en citant Maurice Maeterlink (l’Intelligence des fleurs) parle mieux que quiconque pourrait le faire de cette fleur dans son chapitre « les plantes mobiles ».

A propos de la fleur en général Jean-Marie Pelt dit ceci :

« Quittons les étamines et progressons dans notre voyage au centre de la fleur. Là se trouve l’organe femelle, une boîte gonflée par les futures graines. Au-dessus, un mât plus ou moins long, terminé par un organe récepteur, le stigmate. L’ensemble évoque les antennes de télévision qui ratissent les ondes comme le stigmate ratisse les grains de pollen.

Mais qu’arrive-t-il, demandera-t-on, si le stigmate est situé au-dessus des étamines, si bien que le pollen ne peut l’atteindre directement ? La fécondation directe sera-t-elle encore possible ou bien faudra-t-il avoir recours à la fécondation croisée entre deux fleurs différentes par l’intermédiaire d’un insecte ?

Tel est le dilemme que doit résoudre la nigelle de Damas qui répond aux doux noms contradictoires de « cheveux de Venus » et de « diable-dans-le-buisson »… plus explicite est son troisième nom vernaculaire « belle-aux-cheveux-dénoués ». Avec les « cœurs-de-Marie », les « désespoirs du peintre », les ancolies et quelques campanules à très grosses fleurs, la nigelle faisait partie des jardins de curée d’autrefois. Les cheveux de Venus ou cheveux dénoués évoquent les sépales buissonnants que la fleur entretient à grand frais autour de sa belle corolle bleue.

Mais laissons la parole à Maurice Maeterlink qui avait un faible pour elle :

A la naissance de la fleur, les cinq pistils extrêmement longs se tiennent étroitement groupés au centre de la couronne d’Azur comme cinq reines vêtues de robe verte, altières, inaccessibles. Autour d’elles se pressent, sans espoir la foule innombrable de leurs amants, les étamines, qui n’arrivent pas à la hauteur de leurs genoux.

Alors, au sein de ce palais de turquoises et de saphirs, dans le bonheur des jours d’été, commence le drame sans paroles et sans dénouement que l’on puisse prévoir, de l’attente impuissante, inutile, immobile.

Les heures s’écoulent, qui sont des années de la fleur. L’éclat de celle-ci se ternit, les pétales se détachent et l’orgueil des grandes reines, sous le poids de la vie, semble enfin s’infléchir.

A un moment donné, comme si elles obéissaient au mot d’ordre secret et irrésistible de l’amour qui juge l’épreuve suffisante, d’un mouvement concentré et symétrique comparables aux harmonieuses paraboles d’un quintuple jet d’eau qui retombe dans sa vasque, toutes ensembles se penchent à la renverse et viennent gracieusement cueillir aux lèvres de leurs humbles amants la poudre d’or du baiser nuptial.

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